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Le première biographie de Chantal Mauduit paraît chez Guérin

Tout les amateurs de littérature de montagne connaissent les fameux livres rouges de la maison d'édition Guérin. On les collectionne dans la bibliothèque, on les offre à ses amis ou à ses parents amoureux de la montagne. C'est donc un petit événement que la parution de la première biographie de Chantal Mauduit, une des plus grandes alpinistes françaises.


Les femmes alpinistes étant tellement peu présentes dans la littérature de montagne, je me devais de faire un petit compte-rendu de cet ouvrage écrit par Alexandre Duyck, journaliste et écrivain en autres pour l'effet papillon et le journal du dimanche. La famille de Chantal Mauduit lui a donné accès aux archives personnelles de l'alpiniste, qui consistent en d’innombrables carnets de notes écrits depuis ses dix ans et jusqu'à sa mort à trente-quatre ans sur les pentes du Dhaulagiri. Le texte regorge de citations des ces carnets, d'anecdotes à la fois poignantes et drôles sur la vie de cette femme exceptionnelle, qui gravit six sommets de plus de huit-mille mètres sans oxygène au cours d'une carrière fulgurante.



Dans ses premiers carnets vers l'âge de dix ans, Chantal écrit : « J’aimerais faire de l’alpinisme, malgré les dangers qui nous épient, malgré les séracs, les corniches, les avalanches. » On y découvre la vie d'une enfant dotée de facultés physiques hors- normes et passionnée de ski. Avec son père, son frère et sa sœur, elle crapahute à toute vitesse dans la montagne à vaches autour du chalet familial à Sixt (Haute-Savoie). Adolescente, et malgré son petit gabarit, plus personne ne peut suivre son rythme en montagne. Elle commence l'escalade "en douce" sans le dire à ses parents et se tourne très vite vers les sommets du Massif du Mont-Blanc.


Pendant dix ans, elle écumera progressivement toutes les voies les plus difficiles des Écrins et du Mont Blanc aux côtés de son premier amour Pierre Neyret. Ils ont à peine vingt ans et déjà une liste de courses à faire pâlir un aspirant-guide. Elle s'initie seule au parapente et se lance dans des études de kiné : choix stratégique qui lui permettra de gagner sa vie et de se dégager du temps pour ses futures expéditions. Les premières se feront en Amérique du Sud, au Pérou, avec l'ascension des premiers sommets de plus de six mille mètres. Arrivent aussi les premières tragédies et la mort de son ami Etienne dans la face ouest du Râteau.


Lectrice boulimique, elle remplira ses carnets de citations de poèmes et de textes importants pour elle. Elle vit avec très peu d'argent, mange des pâtes à tout les repas et vit sans voiture dans une petite maison à Chamonix.



Tout son argent gagné avec des remplacements de kiné passe dans ses premiers voyages en Himalaya. Bien évidemment, elle n'imagine pas une seconde utiliser de l'oxygène pour gravir les plus hauts sommets du monde. Ça sera donc sans oxygène, ou rien!


Malgré plusieurs tentatives à L'Everest qui se solderont par des échecs, elle ne cédera jamais à l'appel du sommet à tout prix et saura toujours faire demi-tour dès que sa vie en dépend. "C'est toujours la montagne qui décide si elle veut de vous ou pas" Et ce sera donc Christine Janin, qui sera la première française à atteindre l'Everest, et Alison Hargreaves, la première femme à l'atteindre en solitaire et sans oxygène.


Elle tourne alors ses yeux vers le Pakistan et le K2, où cette fois-ci la montagne voudra bien d'elle. Elle atteint le sommet le 3 août 1992 mais sera tout de même aidée à la descente par les célèbres alpinistes Ed Viesturs et Scott Fischer.


En octobre 1997 paraît son premier livre : J'habite au Paradis. Alexandre Duiyck écris très joliment sur ce livre que : "Sa vie d’aventurière est une expérience littéraire. Son écriture est une aventure"


Chantal parle népalais et s'engage dans la cause humanitaire : elle finance la scolarité d'un petit garçon auquel elle rend souvent visite, accroche le drapeau tibétain en haut de Notre-Dame, et rencontre le Dalaï-Lama. Elle restera profondément chrétienne mais utilisera toute sa vie les principes de la philosophie bouddhiste : Une joie de vivre et un rire permanent, un respect pour la nature sous toutes ces formes. Elle recopiera par exemple des phrases tirées de ses lectures pour les réciter en marchant comme des mantras.


En 1996, elle atteint seule le sommet du Lhotse (son quatrième huit-mille) au moment où se joue de drame le plus célèbre de l'histoire de l'Everest. Elle voit depuis le sommet la tourmente arriver et les grimpeurs exposés sur l'arête qui lui fait face. Elle n'a pas de radio, et c'est en redescendant au camp 3, commun avec l'itinéraire de l'Everest, qu'elle comprend qu'une tragédie est en train de se jouer.



photo Association Chantal Mauduit



« Je n’arriverai jamais à 30 ans. Mourir avant, je pense »



Très médiatisée, elle dira vouloir gravir les quatorze huit mille avant tout pour faire plaisir aux sponsors. La preuve en est qu'elle s'octroiera un séjour dans le Yosemite pour gravir El Capitan, et un autre au Maroc au beau milieu d'un agenda millimétré qui lui devait lui permettre de gravir les sommets restant en quatre ans.


Elle décède lors de sa seizième expédition en Himalaya au Dhaulagiri avec Ang Tsering qu'elle appelait son "frère népalais" et avec qui elle avait partagé beaucoup de projets. On retrouvera leurs corps dans leur tente au Camp 2 en 13 mai 1998, ensevelis sous une avalanche. Ils meurent tout deux dans leur sommeil, la nuque brisée.


Le K2, photo National Geographic



Son père poursuivra l'oeuvre humanitaire de sa fille en créant une école qui porte son nom, non loin de Katmandou. L'association finance aujourd'hui la scolarisation de deux cent cinquante enfants grâce aux dons.


 

Pratiquant la montagne et l'alpinisme à mon petit niveau, et ayant passé la trentaine, j'ai été particulièrement touchée par le texte d'Alexandre Duyck. Au milieu des citations de Chantal transparaît le style du journaliste qui fait preuve d'une certaine pudeur et d'un grand respect pour les proches et la famille de l'alpiniste. Parfois drôle et piquant, ce livre m'a permit de redécouvrir la vie d'une jeune femme exceptionnelle que le monde de la montagne a pu peut-être un peu oublier.


 

Sachez qu'une soirée hommage sera organisée le 16 avril à Chamonix à l'occasion de la sortie de cet ouvrage, où sera projeté le film-documentaire « Portrait de Chantal Mauduit » de Mick Régnier.


Je vous donne le lien vers le site de l'association Chantal Mauduit, pour soutenir la scolarisation des enfants au Népal :


Et je vous recommande d'écouter en podcast l'émission Passion Montagne sur France Bleue Pays de Savoie du dimanche 3 avril consacré à la parution de cette magnifique biographie de Chantal Mauduit :


Bonne lecture...


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